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21 novembre 2024Déclarations

Déclaration | Devoir vivre dans un campement, une violation des droits fondamentaux

Abris au campement de la rue Notre-Dame.
Campement de la rue Notre-Dame par Richard Audet.
L’itinérance n’est pas un choix et les personnes en situation d’itinérance sont elles aussi protégées par la Charte des droits et libertés de la personne, rappelle la Commission des droits.

À l’approche de l’hiver et des temps froids, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse rappelle que l’itinérance n’est pas un choix et que les personnes en situation d’itinérance sont elles aussi protégées par la Charte des droits et libertés de la personne. Des personnes exclues et marginalisées doivent adopter des stratégies de survie, et certaines se retrouvent dans l’impossibilité d’avoir un chez-soi stable.

Au cours des dernières années, l’itinérance a beaucoup augmenté partout au Québec. Entre 2018 et 2022, le nombre de personnes en situation d’itinérance a d’ailleurs augmenté de 44 % selon le Rapport de dénombrement du gouvernement du Québec. Des campements et abris de fortune sont de plus en plus présents dans les villes. Le démantèlement de nombreux camps a eu lieu ou est envisagé par les autorités.

La Commission des droits souligne que les campements ne sont ni une solution à l’itinérance ni un logement adéquat. Mais les options de logement respectueuses de l’ensemble des droits de la personne manquent pour une partie grandissante de la population et les campements représentent alors la seule solution. Il s’agit d’une stratégie de survie pour les personnes en situation d’itinérance, mais aussi une manifestation de la discrimination systémique et de l’exclusion sociale qu’elles vivent.

Les personnes en situation d’itinérance vivent largement dans l’espace public ce qui relève habituellement de la sphère privée: besoins physiologiques, sommeil, hygiène, maladie et soins de santé, sexualité, état de crise, consommation, etc. Cela entraîne comme conséquence de les exposer au jugement de la population, mais aussi à des sanctions plus fréquentes par les autorités. Elles se trouvent ainsi plus fréquemment judiciarisées que les autres.

La vulnérabilité des personnes en situation d’itinérance est alimentée par plusieurs facteurs socioéconomiques, notamment la pauvreté et l’instabilité résidentielle accrue par la crise du logement. Ces situations sont souvent exacerbées par des stéréotypes et des préjugés qui conduisent à la discrimination, l’exclusion sociale et la marginalisation. L’itinérance est un phénomène dont les conséquences sont néfastes et délétères pour la cohésion sociale.

Comme l’a fait la Rapporteuse spéciale de l’ONU sur le droit à un logement convenable, il convient de rappeler l’obligation de l’État d’assurer la mise en œuvre du droit à un logement convenable, mais aussi l’importance d’assurer le respect des droits des personnes qui résident dans des campements alors qu’elles attendent des solutions de logement adéquates et abordables qui puissent répondre à leurs besoins particuliers.

Les réponses offertes à la multiplication des campements diffèrent en fonction des municipalités ou des autres niveaux de gouvernement, mais elles ont trop souvent pour effet de pénaliser les personnes qui y résident et de les placer dans une situation encore plus précaire et marginalisée qu’elles ne l’étaient. Sauf exception, le droit international interdit d’ailleurs les expulsions forcées des campements de personnes en situation d’itinérance.

Dans un contexte où les coûts du logement explosent, où les listes d’attente pour un logement social s’allongent et où les refuges d’urgence sont au maximum de leur capacité, ces interventions ne font que déplacer le problème, au détriment de la sécurité et de la dignité des personnes concernées. Plus largement, une approche réellement basée sur les droits implique la participation des personnes qui résident dans les campements dans l’identification et la mise en place de réelles solutions à ceux-ci.

Quand les portes se ferment, que les facteurs d’exclusion se cumulent, que le réseau de solidarité s’épuise, que les mécanismes de protection de notre société se montrent inaccessibles ou inefficaces, des personnes se retrouvent exclues et marginalisées. Au nom de la dignité humaine, il est urgent de mettre tout en œuvre pour trouver des solutions pérennes à cette problématique sociale et garantir le droit à l’égalité et le respect des droits fondamentaux des personnes en situation d’itinérance.

Les États généraux de l’itinérance 2024 qui s’ouvrent la semaine prochaine pendant trois jours nous offrent l’occasion de nous rassembler pour réaffirmer notre devoir collectif de renverser la tendance et de construire des solutions structurantes et durables.