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9 février 2016Communiqués

Projet de loi no 70 : La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse souhaite une approche plus respectueuse des droits de la personne

La Commission estime que l’approche de lutte à la pauvreté préconisée dans le projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l’emploi ainsi qu’à favoriser l’intégration à l’emploi, est contraire aux droits et libertés de la personne.

Québec, le 9 février 2016 – La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse estime que l’approche de lutte à la pauvreté préconisée dans le projet de loi  70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l’emploi ainsi qu’à favoriser l’intégration à l’emploi, est contraire aux droits et libertés de la personne.

Dans son mémoire présenté aujourd’hui à la Commission de l’économie du travail de l’Assemblée nationale, la Commission rappelle que l’objectif d’insertion à l’emploi au marché du travail est louable et que l’offre de mesures d’aide pour y arriver est nécessaire. La Commission recommande néanmoins de modifier le projet de loi afin que l’octroi d’une aide financière de dernier recours ne soit pas soumis à des conditions, pour certaines catégories de personnes, qui ne tiennent pas compte de leurs besoins, parce que cela reviendrait à leur nier certains droits protégés par la Charte des droits et libertés de la personne.

« La Commission n’a cessé de souligner l’importance d’aborder la pauvreté dans une perspective systémique, a déclaré Renée Dupuis, vice-présidente de la Commission en faisant allusion aux nombreux travaux sur la pauvreté et l’exclusion sociale réalisés par la Commission au cours des 40 dernières années. « Le Programme objectif emploi n’adopte cependant pas une telle perspective et il risque d’accroître la discrimination systémique vécue par les personnes visées sur la base de leur condition sociale ».

Elle a aussi rappelé les résultats d’un rapport de recherche qui confirme l’ampleur des préjugés et stéréotypes ciblant déjà les personnes en situation de pauvreté et, plus particulièrement, celles inscrites à un programme d’aide sociale. En effet, ce rapport révèle que 49,1 % des Québécois affirment entretenir une opinion négative à l’égard des prestataires de l’aide sociale et que la figure de « l’assisté social » fait l’objet d’une forme de stigmatisation.

Ces préjugés constituent une toile de fond à la discrimination que ces personnes vivent, notamment en matière d’assistance financière, d’emploi, de logement et de services. Les personnes visées par le Programme objectif emploi doivent donc faire face à de nombreux obstacles discriminatoires et systémiques pour se sortir de la pauvreté.

Madame Dupuis a cité en exemple le cas d’une femme, mère de famille monoparentale, contrainte de demander une prestation d’aide sociale, mais dont les obligations familiales ne lui permettraient pas nécessairement de garder un emploi pourtant jugé « convenable » au sens du projet de loi.

La Commission s’est ainsi dite préoccupée par les impacts discriminatoires de la mise en œuvre du Programme objectif emploi, notamment à la lumière de l’article 10 de la Charte qui interdit toute discrimination dans la reconnaissance et l’exercice du droit à un niveau de vie décent, notamment sur la base de la condition sociale.

La Commission souligne aussi que les mesures d’aide à l’emploi doivent être conçues dans le respect du droit au travail et des droits et libertés de la personne applicables en matière d’emploi. L’obligation d’accepter tout emploi convenable sous peine de sanction contrevient d’abord au droit à la liberté de sa personne qui, dans le contexte du travail, se traduit par la liberté du travail.

Ainsi, la Commission recommande que, sans préjudice à leur droit à des mesures financières et à des mesures sociales qui leur assurent un niveau de vie décent, les participants au Programme objectif emploi puissent a) contribuer à la détermination du caractère convenable de l’emploi qui leur est offert, notamment en fonction de leurs caractéristiques et situation personnelles, b) conserver leur faculté de démission sans pénalité sous réserve des dispositions du droit du travail applicables et c) jouir des normes minimales de travail et du droit d’appartenir à un syndicat.

Toujours dans le cadre d’une approche d’intégration à l’emploi fondée sur les droits et libertés de la personne, la Commission est d’avis que les mesures d’aide à l’emploi doivent être définies en tenant compte des facteurs d’ordre systémique qui caractérisent le marché de l’emploi et constituent des obstacles pour les personnes inscrites à un programme d’aide sociale.

Les préjugés qui ciblent les personnes inscrites à un programme d’aide sociale s’expriment notamment par des pratiques discriminatoires en embauche, alimentés par des employeurs qui entretiennent des préjugés à leur égard. Dans cet esprit, la Commission réitère ses recommandations faites dans le passé concernant le renforcement des programmes d’accès à l’égalité, l’implantation élargie de ceux-ci à la fonction publique du Québec et aux entreprises privées.

Le mémoire de la Commission sur le projet de loi n° 70 est disponible à :www.cdpdj.qc.ca/storage/app/media/publications/memoire_PL_70_emploi_pauvrete.pdf

Pour en savoir davantage sur la discrimination fondée sur la condition sociale :www.cdpdj.qc.ca/fr/droits-de-la-personne/motifs/Pages/condition-sociale.aspx

Voir aussi la page de la Commission sur les droits économiques et sociaux :www.cdpdj.qc.ca/fr/droits-de-la-personne/vos-droits/Pages/des.aspx

La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse assure le respect et la promotion des principes énoncés dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Elle assure aussi la protection de l’intérêt de l’enfant, ainsi que le respect et la promotion des droits qui lui sont reconnus par la Loi sur la protection de la jeunesse. Elle veille également à l’application de la Loi sur l’accès à l’égalité en emploi dans des organismes publics.


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Source :
Jean-François Gagnon
514 873-5146 ou 1 800 361-6477, poste 230
jean-francois.gagnon@cdpdj.qc.ca

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