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Outil d'aide au traitement des dossiers : Chiens et autres animaux d'assistance utilisés pour pallier le handicap

Titre intégral : Chiens guides ou d’assistance et autres animaux d’assistance utilisés comme moyen pour pallier le handicap

Mise en garde

Cet outil ne tient pas lieu d’avis juridique et ne couvre que les situations les plus couramment rencontrées. Date de sa dernière mise à jour : Juin 2025.

  • Domaine d'application

    Le droit d’une personne en situation de handicap d’utiliser un chien guide ou d’assistance comme moyen pour pallier son handicap a été reconnu à ce jour dans les contextes suivants:

    • Lors de la conclusion d’actes juridiques visant des services ou des biens ordinairement offerts au public (article 12 de la Charte). Par exemple, en matière de logement, dans les garderies, les établissements d’enseignement ou les organismes dispensant des activités sportives ou culturelles.
    • Dans l’accès aux moyens de transport ou aux lieux publics (article 15 de la Charte). Par exemple, les taxis, les commerces, les restaurants, les bars, les hôtels ou les campings.
    • En matière d’emploi (article 16 de la Charte).
    • Dans une clause d’un acte juridique (article 13 de la Charte). Par exemple, une clause d’un bail d’habitation qui interdit la présence de tout animal, sans exception possible pour les animaux guides ou d’assistance.

    La discrimination peut découler non seulement du refus d’admettre une personne dans un lieu public en raison de la présence de son chien guide ou d’assistance, mais aussi du fait de ne pas offrir à cette personne les mêmes services, confort et respect qui y sont habituellement offerts.

    Par exemple, le fait de refuser la table d’un restaurant convoité par un client et de lui en imposer une autre en raison de la présence de son chien guide ou d’assistance constitue de la discrimination, et ce, même s’il n’y a pas eu un refus d’accès au restaurant[1]. Dans le même ordre d’idée, permettre à une personne d’utiliser la zone VIP d’une discothèque, mais l’empêcher d’utiliser la section principale, dont la piste de danse, en raison de la présence de son chien-guide, constitue de la discrimination[2]. On peut aussi penser au fait d’imposer une surcharge de nettoyage dans un hôtel en raison de la présence du chien guide ou d’assistance[3] ou d’obliger trois clientes ayant des chiens d’assistance à réserver des chambres séparées, alors qu’elles souhaitaient partager une chambre, et ce, en raison de la présence de leurs chiens d’assistance[4].



    [1] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Larochelle) c. 142006 Canada inc. (Caverne grecque), 2012 QCTDP 14.

    [2] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. 9185-2152 Québec inc. (Radio Lounge Brossard), 2015 QCCA 577.

    [3] Boulanger c. Gestion Lessard et Boulianne inc. (Hôtel Georges), 2025 QCCQ 936.

    [4] Roy c. Abrama inc. (Hôtel et suites Empire), 2024 QCCQ 2732 (CanLII).

  • Personnes bénéficiant de la protection

    La personne accompagnée d’un chien guide ou d’assistance qu’elle utilise comme moyen pour pallier son handicap 

    Depuis plusieurs années, les tribunaux québécois reconnaissent le chien comme moyen utilisé pour pallier le handicap de la personne ayant une déficience visuelle, étant malentendante ou sourde[1], ayant un handicap moteur ou cognitif (ex. : dystrophie musculaire; triplégie; quadriplégie; paraplégie; maladie d'ataxie de Friedreich neurodégénérative; épilepsie[2]) ou ayant un trouble du spectre de l’autisme (TSA)[3].

    En outre, les tribunaux ont récemment reconnu qu’un chien d’assistance psychiatrique constitue un moyen pour pallier le handicap d’une personne ayant un désordre de stress post-traumatique, un trouble d’anxiété et un trouble de panique[4].

    Cela dit, cette liste n’est pas limitative et le chien d’assistance pourrait être reconnu comme un moyen utilisé pour pallier d’autres handicaps. Par exemple, en Ontario, il a déjà été reconnu comme un moyen utilisé pour pallier l’anxiété et la dépression[5].

    Par ailleurs, la personne en situation de handicap peut utiliser plus d’un moyen pour pallier son handicap[6] (ex. : un fauteuil roulant et un chien d’assistance) et le choix de ce moyen lui appartient[7].

    La personne qui est accompagnée du chien guide ou d’assistance d’une personne dont elle est responsable 

    La protection de la Charte s’applique aux personnes qui sont responsables de la personne en situation de handicap lorsqu’elles sont accompagnées du chien guide ou d’assistance de cette dernière, même en son absence. Par exemple, des parents qui ont la garde du chien d’assistance de leur enfant et vont dans un hôtel avec ce chien en l’absence de leur enfant[8].

    La personne qui accompagne la personne utilisant un chien guide ou d’assistance

    La personne qui accompagne la personne qui utilise un chien guide ou d’assistance lors du refus d’accès à un lieu public fondé sur la présence du chien peut elle aussi invoquer la protection de la Charte contre la discrimination[9].

    La personne ayant la garde d’un chien en formation pour devenir un chien guide ou d’assistance

    La Charte devant recevoir une interprétation large et libérale, il serait envisageable d’étendre la protection de celle-ci aux personnes ayant la charge d’un chien guide ou d’assistance en formation[10]. Le TDP a récemment reconnu qu’un chien d’assistance en cours de formation constituait un motif « moyen pour pallier le handicap »[11]. La jurisprudence étant toutefois très limitée sur le sujet, il est nécessaire d’évaluer, au cas par cas, si la situation fait naître une obligation d’accommodement raisonnable.



    [1] Moran c. Montréal (Ville de), 2012 QCCS 1148.

    [2] Lapointe c. Desjardins, 2017 QCCS 5566, aux para 32 à 44 (en plus de l’épilepsie, Cloé a un TDA avec hyperactivité et des difficultés cognitives, et le chien d’assistance permettrait notamment de diminuer son stress et son anxiété).

    [3] Baril c. Gestion Lisette & Pierre inc. (Boutique Click), 2021 QCTDP 30; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (D.R. et autres) c. Ducharme, 2020 QCTDP 16; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Acoca et une autre) c. Destination Dollar Plus inc., 2014 QCTDP 15.

    [4] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (G. J.-C.) c. Ville de Gatineau, 2022 QCTDP 22 (CanLII); Roy c. Abrama inc. (Hôtel et suites Empire), 2024 QCCQ 2732 (CanLII).

    [5] Allarie v. Rouble, 2010 HRTO 61.

    [6] Louise Pilon c. Corporation Intermunicipale de Transport des Forges, C.S. (1995), n° 400-05-000528-944, AZ-95021229.

    [7] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Larochelle) c. Montuori Holdings Corporation (Pizzeria Napoli enr.), 2008 QCTDP 2; Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. 2858029 Canada Inc., 1995 CanLII 10761 (QC TDP).

    [8] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Côté, 2015 QCCA 1544; Baril c. Gestion Lisette & Pierre inc. (Boutique Click), 2021 QCTDP 30; Bédard c. 9127-3870 Québec inc., 2020 QCCQ 4221.

    [9] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Huard et une autre) c. Karimi, 2021 QCTDP 12.

    [10] Dans l’affaire Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Côté, 2015 QCCA 1544, le TDP, en première instance, avait refusé de conclure à l’existence de discrimination au motif de l’absence de disposition, dans la Charte ou dans une loi particulière, attribuant un statut particulier à l’entraineur d’un chien d’assistance et aux tuteurs de la personne en situation de handicap, contrairement à ce que prévoit expressément des textes législatifs étrangers. Or, la Cour d’appel a rejeté cette méthode d’analyse, inappropriée dans la mesure où la Charte doit recevoir interprétation large et libérale privilégiant les objectifs généraux de ce texte quasi constitutionnel. La Cour d’appel a ainsi jugé que la protection de la Charte s’étendait aux tuteurs de la personne en situation de handicap. Ainsi, suivant une analyse large et libérale similaire, il serait possible de faire valoir que la protection de la Charte doit également s’étendre aux dresseurs de chiens guide ou d’assistance ou à ceux qui en ont la garde pendant leur formation.

    [11] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (G. J.-C.) c. Ville de Gatineau, 2022 QCTDP 22, par. 89-90 (CanLII).

  • Animaux considérés comme un moyen utilisé pour pallier un handicap

    Définition du motif « utilisation d’un moyen pour pallier le handicap » 

    Un courant jurisprudentiel s’est développé quant à l’interprétation large que doit recevoir le motif de « l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap » : « cette expression doit être interprétée de façon large et libérale afin d’y inclure non seulement de l’équipement quelconque, tel un fauteuil roulant, mais aussi toutes formes de mesures raisonnables nécessaires pour qu’une personne handicapée puisse exercer en toute égalité ses droits »[1].

    Le type d’animal 

    Bien que le chien soit le seul animal ayant, à ce jour, été reconnu par les tribunaux du Québec, un autre animal pourrait aussi être reconnu comme étant un moyen utilisé pour pallier le handicap au sens de la Charte si la démonstration de ses effets bénéfiques pour la personne en situation de handicap est faite.

    D’ailleurs, certaines législations d’autres provinces prévoient la possibilité qu’un animal, autre qu’un chien, soit utilisé pour pallier le handicap[2]. Par exemple, en Ontario, la protection contre la discrimination a déjà été reconnue, dans un contexte de logement, à une personne utilisant un chat pour pallier son handicap (dépression)[3].

    Par ailleurs, bien que ces décisions n’aient pas été rendues en application de la Charte, le Tribunal administratif du logement reconnaît qu’un chat peut être nécessaire pour la santé d’un locataire[4] et qu’un lapin peut avoir des vertus thérapeutiques de type zoothérapie[5].

    Le rôle et la formation de l’animal 

    Au Québec, ni la Charte ni la jurisprudence ne définit de critères spécifiques pour établir si un animal constitue un « moyen pour pallier le handicap » conformément à l’article 10 de la Charte. Ainsi, une évaluation au cas par cas est nécessaire.

    Cela dit, il ressort de la jurisprudence que certains éléments, non cumulatifs, peuvent aider à évaluer si un chien peut être reconnu comme tel, notamment :

    • L’entrainement reçu par le chien auprès d’un organisme spécialisé[6], tel que, à titre d’exemple, la fondation MIRA, l’association Leader Dogs for the Blind ou l’association des Lions[7];
    • La valeur monétaire du chien[8];
    • Les effets bénéfiques de l’utilisation du chien d’assistance : l’amélioration de la qualité de vie et le maintien de l’équilibre psychologique[9];
    • L’autonomie qu’acquiert la personne en situation de handicap, lorsqu’accompagnée d’un chien d’assistance[10].

    Malgré ce qui précède, la jurisprudence au Québec n’exclut pas formellement la possibilité qu’un chien, n’ayant pas reçu un entrainement auprès d’un organisme spécialisé, soit reconnu comme un moyen pour pallier le handicap. Ainsi, bien que cela n’ait pas encore été tranché par les tribunaux québécois, il serait envisageable qu’un chien de soutien affectif (zoothérapie) soit reconnu comme un moyen pour pallier le handicap, même s’il n’a pas reçu d’entrainement par un organisme spécialisé, si celui-ci a des effets bénéfiques sur la personne en situation de handicap[11]. Une évaluation au cas par cas est toutefois nécessaire.

    Notons tout de même que le tribunal administratif du logement a déjà jugé que le fait de soumettre un certificat médical indiquant qu’un chien pourrait être utile pour pallier un trouble anxieux et un trouble de la personnalité limite, alors que le chiot n’a pas encore reçu de formation particulière et que sa maitresse ne démontre pas avoir les aptitudes nécessaires pour le former le chien ni du support qu’elle recevra d’un organisme pour ladite formation, n’est pas suffisant pour démontrer que le chien va devenir un chien d’assistance qui pallie un handicap. Dans ce jugement, le tribunal administratif du logement semble accorder de l’importance à l’existence d’une certification.[12]

    Par ailleurs, des tribunaux d’autres provinces reconnaissent qu’il n’est pas nécessaire ou indispensable qu’un chien d’assistance ait reçu une formation. Il faut démontrer qu’il sert à pallier un handicap, mais cela peut être démontré même si le chien n’a pas suivi de formation. C’est le cas notamment du tribunal des droits de la personne de Terre-Neuve et Labrador[13] et du tribunal ontarien des droits de la personne[14].


    [1] Commission des droits de la personne (Meunier et autres) c. Restaurant Scampinata inc., 1994 CanLII 2338.

    [2] En Ontario, le Code des droits de la personne, LRO, 1990, c H. 19, art. 10 a) et la Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario, LO 2005, c 11, art. 2, prévoient que le terme handicap s’entend notamment de « tout degré d’incapacité physique, d’infirmité, de malformation ou de défigurement dû à une lésion corporelle, une anomalie congénitale ou une maladie, et, notamment, le diabète sucré, l’épilepsie, un traumatisme crânien, tout degré de paralysie, une amputation, l’incoordination motrice, la cécité ou une déficience visuelle, la surdité ou une déficience auditive, la mutité ou un trouble de la parole, ou la nécessité de recourir à un chien-guide ou à un autre animal, à un fauteuil roulant ou à un autre appareil ou dispositif correctif ».
    À l’Îles du Prince Édouard, l’article 1er (c.1) du Human Rights Act prévoit également la définition suivante du handicap « a previous or existing disability, infirmity, malformation or disfigurement, whether of a physical, mental or intellectual nature, that is caused by injury, birth defect or illness, and includes but is not limited to epilepsy, any degree of paralysis, amputation, lack of physical coordination, blindness or visual impediment, deafness or hearing impediment, muteness or speech impediment, or physical reliance on an assist animal, wheelchair or other remedial device”.
    En Saskatchewan, l’article 2 a) viii) du Code des droits de la personne de la Saskatchewan de 2018 incorpore dans sa définition du terme « incapacité » : « a) un niveau quelconque d’incapacité physique, d’infirmité, de malformation ou de défigurement, s’agissant notamment : (viii) du besoin d’animal d’assistance, de fauteuil roulant ou de quelque autre appareil ou dispositif de correction ».
    Au Yukon, l’article 37 de la Loi sur les droits de la personne LRY 202, ch. 116, prévoit notamment dans la définition de « incapacité physique », « la nécessité de recourir à un animal d’assistance ».

    [3] Niagara North Condominium Corp. No. 46 v. Chassie, 1999 CanLII 15035 (ON SC).

    [4] Voir notamment : Centre de ressourcement de réinsertion d’intervention c. Francoeur, 2024 QCTAL 16437 (CanLII) (chat).

    [5] Voir notamment : Berniqué c. Office municipal d’habitation de Salaberry-de-Valleyfield, 2021 QCCQ 7326 (lapin).

    [6] Voir notamment : Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Lapalme) c. 9096-4545 Québec inc., 2003 CanLII 34451 (QC TDP); Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Duchesne) c. Quillorama de l’Anse inc., 1998 CanLII 41 (QC TDP); Commission des droits de la personne du Québec (Gauvin) c. Hétu, 1992 CanLII 12 (QC TDP); Commission des droits de la personne du Québec c. Vithoulkas, (1983) 4 C.H.R.R. D/1299; Lapointe c. Desjardins, 2017 QCCS 5566, par. 161 et 162; Gendron c. Gilbert, 2013 CanLII 118739 (QC TAL), par. 83 et 84.

    [7] Dans la très grande majorité des décisions rendues par les tribunaux québécois, le chien guide ou d’assistance était formé par la fondation MIRA. Cela dit, les tribunaux québécois ont également reconnu comme moyen pour pallier le handicap des chiens formés par d’autres associations, plus particulièrement : Leader Dogs for the Blind (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Huard et une autre) c. Karimi, 2021 QCTDP 12)); Canadian Guide Dogs for the Blinds (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Poulin) c. 9107-9194 Québec inc. (Restaurant Jing Hua), 2005 CanLII 48891 (QC TDP)); Association des Lions (Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. 2858029 Canada Inc., 1995 CanLII 10761 (QC TDP)); Hearing Ear Dogs of Canada (projet de l’Association des Lions) (Moran c. Montréal (Ville de), 2012 QCCS 1148); Psy’chien (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (G. J.-C.) c. Ville de Gatineau, 2022 QCTDP 22).

    [8] Commission des droits de la personne du Québec c. Vithoulkas, (1983) 4 C.H.R.R. D/1299.

    [9] Louise Pilon c. Corporation Intermunicipale de Transport des Forges, C.S. (1995), n° 400-05-000528-944, AZ-95021229. Voir aussi : dans l’affaire Moran c. Montréal (Ville de), 2012 QCCS 1148, par. 47 à 54, la Cour a jugé que même si la personne en situation de handicap auditif utilise un implant lui permettant d’entendre, son chien d’assistance qui l’aide à se sentir davantage en sécurité et à sortir davantage, constitue un moyen pour pallier le handicap, puisqu’il n’est pas requis que le chien soit essentiel, mais plutôt qu’il soit bénéfique physiquement ou psychiquement.

    [10] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Lapalme) c. 9096-4545 Québec inc., 2003 CanLII 34451 (QC TDP); Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Duchesne) c. Quillorama de l’Anse inc., 1998 CanLII 41 (QC TDP); Louise Pilon c. Corporation Intermunicipale de Transport des Forges, C.S. (1995), n° 400-05-000528-944, AZ-95021229.

    [11] Bien que cela n'ait pas encore été reconnu par les tribunaux québécois, il a en revanche déjà été jugé, en matière de logement, qu’une clause interdisant la présence d’un animal alors que celui-ci, preuve médicale à l’appui, est nécessaire pour la santé physique et/ou psychologique du locataire ou a une utilité thérapeutique et l’aide d’un point de vue affectif ou psychologique, est abusive. Voir notamment : J.L. c. Coopérative de l’Ébène, 2004 CanLII 47995 (QC CQ) (chat); D.C. c. Berthierville (Office municipal d’habitation de), 2012 QCCQ 1524 (chien); Berniqué c. Office municipal d’habitation de Salaberry-de-Valleyfield, 2021 QCCQ 7326 (lapin); Duhamel c. Arseneault, 2022 QCTAL 4284 (CanLII) (chat); Centre de ressourcement de réinsertion d’intervention c. Francoeur, 2024 QCTAL 16437 (CanLII) (chat).

    [12] Maheux c. Immeubles LPL, 2023 QCTAL 31784 (CanLII).

    [13] Robert v Dave Gulliver’s Cabs Limited (o/a City Wide Taxi), 2024 CanLII 141197 (NL HRC).

    [14] Allarie v. Rouble, 2010 HRTO 61.

  • Éléments de preuve requis pour montrer que le chien constitue un moyen pour pallier le handicap

    Chien ayant reçu un entrainement par un organisme spécialisé 

    Lorsqu’un chien guide ou d’assistance est entrainé par un organisme spécialisé, la jurisprudence reconnait que la preuve requise pour démontrer qu’il s’agit bien d’un chien guide ou d’assistance est « fort simple »[1]. Ainsi le port d’un harnais réglementaire ou d’une veste portant le logo de l’organisme devrait normalement suffire[2]. Sinon, la personne pourrait aussi présenter une carte de certification ou d’identification de l’organisme confirmant le statut de chien guide ou d’assistance du chien[3].

    Cela dit, dans un contexte d’emploi, le TDP a déjà, à une occasion, jugé qu’un employeur pouvait, dans une situation spécifique qui visait un emploi d’animatrice de camp de jour, exiger certaines informations sur l’état de santé d’une candidate afin de s’assurer que l’utilisation de son chien en formation lui permettait de pallier son handicap et de rencontrer les aptitudes et exigences requises par l’emploi convoité[4].

    Chien n’ayant pas reçu d’entrainement par un organisme spécialisé 

    L’absence d’entrainement par un organisme spécialisé est susceptible d’avoir un impact sur le niveau ou le type de preuve que peut exiger la personne à qui une demande d’accommodement est faite. En effet, en l’absence d’un harnais règlementaire ou d’une carte d’identification d’un organisme spécialisé, il se pourrait que la preuve d’un certificat médical confirmant le besoin d’un chien guide ou d'assistance soit demandée[5]. La personne à qui la demande d’accommodement a été faite pourra recueillir toute l’information pertinente en lien avec la demande d’accommodement[6].

    De plus, le degré de preuve pourrait varier dépendamment du lieu et du contexte visés par la demande d’accommodement raisonnable. En effet, l’utilisation d’un chien dans son logement est distincte de l’utilisation d’un chien dans les transports publics, dans un milieu d’enseignement ou sur un lieu de travail. Dans ces cas-là, notamment, des enjeux de sécurité pourraient davantage se poser puisque d’autres personnes risquent d’être affectées. Or, l’absence d’entrainement du chien pourrait poser des enjeux de sécurité.

    Comme il y a peu, voire pas de jurisprudence sur la question, il faut faire une analyse au cas par cas.

    Cela dit, il est intéressant de noter que dans une décision récente[7], le TDP souligne que, selon le Guide du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’alimentation du Québec, lorsqu’une personne en situation de handicap utilise un chien guide ou un chien d’assistance dans un établissement alimentaire, l’exploitant peut, afin de respecter la Loi sur les aliments

    1. vérifier que le chien porte un élément d’identification visuel; ou
    2.  demander un document attestant de l’entrainement du chien, décerné par un organisme spécialisé; ou 
    3. demander si le chien pallie un handicap de la personne qui l’accompagne. 

    Le Guide prévoit également que la personne accompagnée du chien n’a pas à fournir une recommandation d’une personne professionnelle certifiant qu’elle a un besoin médical ou une condition de santé justifiant le besoin d’un chien-guide ou d’un chien d’assistance. Bien que le respect de ce guide vise le respect de la Loi sur les aliments, et non pas de la Charte, ces éléments demeurent pertinents, notamment pour analyser de possibles arguments de contrainte excessive qui seraient liés au besoin de respecter la Loi sur les aliments.



    [1] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Dubuc) c. 9157-6652 Québec inc. (Restaurant Le Coin Grec), 2008 QCTDP 16.

    [2] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Acoca et une autre) c. Destination Dollar Plus inc., 2014 QCTDP 15; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Dubuc) c. 9157-6652 Québec inc. (Restaurant le Coin Grec), 2008 QCTDP 16.

    [3] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Côté) c. 9051-5396 Québec inc. (Camping Plage de la baie), 2011 QCTDP 16; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Larochelle) c. Montuori Holdings Corporation (Pizzeria Napoli enr.), 2008 QCTDP 2.

    [4] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (G. J.-C.) c. Ville de Gatineau, 2022 QCTDP 22 (CanLII).

    [5] Allarie v. Rouble, 2010 HRTO 61, par. 36.

    [6] Voir notamment : Moran c. Montréal (Ville de), 2012 QCCS 1148, par. 116 et 124; Allarie v. Rouble, 2010 HRTO 61.

    [7] Boulanger c. Pouliot (Folle Tablée), 2024 QCTDP 15, par. 78 à 80.

  • L’obligation d’accommodement raisonnable

    Principes directeurs en matière d’accommodement 

    Le fournisseur de service ou l’employeur a une obligation d’accommodement raisonnable jusqu’à la limite de la contrainte excessive. Il doit ainsi démontrer que « les moyens raisonnables d’accommoder ont été épuisés et qu’il ne reste que des options d’accommodement déraisonnables ou irréalistes »[1].

    L’obligation d’accommodement doit aller au-delà de l’élimination de barrières physique et viser l’élimination de barrières psychologiques à l’accès des personnes en situation de handicap dans les lieux publics[2].

    Cette obligation implique aussi de faire des efforts réels pour comprendre et bien percevoir la condition d’une personne en situation de handicap, faire preuve de patiente et écouter les explications de celle-ci.[3]

    La proposition de séparer un chien guide ou d’assistance de son maître ne peut d’aucune manière constituer un accommodement raisonnable puisqu’exiger l’expulsion d’un chien guide ou d’assistance revient à exiger en quelque sorte l’expulsion même de la personne en situation de handicap. Ainsi, à titre d’exemples, ne sauraient être considérées comme constituant un accommodement raisonnable les alternatives suivantes :

    • Laisser le chien à l’extérieur du restaurant en permettant à son maître de prendre un repas à l’intérieur[4];
    • Laisser le chien dans le hall d’entrée d’un restaurant, le mettant ainsi dans une pièce adjacente vitrée à celle où se trouve sa maitresse[5];
    • Laisser le chien au vestiaire d’un bar[6].

    Par ailleurs, n’ont pas été retenus comme étant des facteurs à considérer pour évaluer le caractère excessif de la contrainte lors d’une demande d’accommodement : la préférence de la clientèle[7]; la crainte de créer un précédent[8]; les limites d’une police d’assurance qui ne couvre pas les dommages causés par un chien ou à un chien[9]; la crainte qu’un chien puisse endommager le plancher d’un logement[10].

    Éléments de contrainte excessive liés à l’existence d’un risque pour la sécurité de la clientèle, de la personne en situation de handicap ou du chien[11] 

    Il ne suffit pas d’invoquer la sécurité ou un certain risque pour avoir gain de cause, puisque les craintes relatives à la sécurité peuvent souvent être le résultat de perceptions qui faussent la réalité. Il faut éviter de conclure à un risque grave ou excessif sur la base d’impressions.

    Les considérations liées à la sécurité, en raison d’un risque, n’éliminent pas l’obligation d’accommodement raisonnable. Il faut, jusqu’à la limite de la contrainte excessive, adopter des mesures visant à atténuer les risques appréhendés.

    Ainsi, seul les risques « graves ou excessifs » qui ne peuvent être contenus par une mesure d’accommodement, à la limite de la contrainte excessive, pourront justifier une décision ou une mesure discriminatoire.

    Il a déjà été jugé que le risque appréhendé que causerait la présence d’un chien guide ou d’assistance formé par une association comme la fondation MIRA dans un établissement tel une discothèque ou un bar ne constitue pas un risque grave ou excessif justifiant d’exclure de l’établissement ou de la section principale de l’établissement la personne utilisant le chien pour pallier son handicap[12]. Il serait donc a priori difficile pour un défendeur de prétendre qu’un chien d’assistance représente un danger pour les autres clients ou même pour le chien lui-même, si celui-ci a été dressé par un organisme spécialisé.

    Éléments de contrainte excessive liés à des conditions de santé (allergies, phobie, etc.)

    Certaines situations pourraient soulever des arguments de contrainte excessive, comme par exemple, des allergies ou phobies aux chiens. Pourrait constituer une contrainte excessive le fait, pour un chauffeur de taxi ayant une allergie aux chiens attestée par un médecin, de faire monter dans son véhicule un chien guide ou d’assistance[13].

    Cela dit, de telles allergies et phobies ne dispensent par la personne à qui une demande d’accommodement est faite de chercher une piste de solution jusqu’à la limite de la contrainte excessive. L’évaluation doit se faire au cas par cas.

    Ainsi, plusieurs décisions ont déjà conclu à l’existence de discrimination malgré l’existence d’allergies ou de phobies aux chiens. Les tribunaux ont d’ailleurs déjà souligné que « les conséquences de l’allergie canine ne sont pas aussi néfastes que celles de l’allergie alimentaire »[14] et qu’il n’y aurait donc pas de « menace sérieuse à la santé en l’absence de contacts très étroits entre le chien et la personne allergique »[15].

    Par exemple, il a déjà été jugé que le fait qu’un serveur d’un restaurant ait une allergie aux chiens ne constitue pas un argument valable de contrainte excessive permettant d’empêcher la personne accompagnée de son chien d’assistance d’accéder à ce restaurant, puisque c’est sans difficulté particulière qu’un changement de serveur aurait été possible[16].

    Il a également déjà été jugé que malgré la phobie des chiens de son épouse, le propriétaire d’un hôtel aurait dû examiner si un accommodement était possible et essayer de trouver un compromis acceptable (ex. : appeler la réception avant de sortir de la chambre, entrer par une autre porte, etc.) pour les parties plutôt que d’adopter une attitude hostile et intransigeante de refus d’accès, et ce, même s’il habite sur les lieux avec son épouse[17].

    Le TDP a même déjà souligné qu’il appartient à la personne ayant une phobie des chiens de prendre tous les moyens normaux et raisonnables à sa disposition pour pallier son problème et pour se conformer aux exigences de la loi[18]. La Cour supérieure a également retenu que, dans les transports en commun, il incombait au transporteur d’organiser son transport afin de contrer les problèmes liés notamment aux réactions allergiques[19].

    Il ressort également de la jurisprudence que le seul fait d’invoquer des allergies aux chiens ou une phobie des chiens, sans plus de preuve, pourrait s’avérer insuffisant pour faire valoir un argument de contrainte excessive à cet égard. En effet, les tribunaux pourraient exiger une preuve médicale ou psychologique à l’appui[20].



    [1] Conseil des Canadiens avec déficiences c. Via Rail Canada inc. [2007] 1 R.C.S. 650, par. 130.

    [2] Commission des droits de la personne (Meunier et autres) c. Restaurant Scampinata inc., 1994 CanLII 2338.

    [3] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Allard) c. Roi du dollar et plus, 2003 CanLII 36171 (QC TDP); Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Côté) c. 9051-5396 Québec inc. (Camping Plage de la baie), 2011 QCTDP 16.

    [4] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Larochelle) c. Montuori Holdings Corporation (Pizzeria Napoli enr.), 2008 QCTDP 2. Voir aussi, dans un contexte d’accès à une piscine : Joly c. Page, 2001 CanLII 17457 (QC CS).

    [5] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Poulin) c. 9107-9194 Québec inc. (Restaurant Jing Hua), 2005 CanLII 48891 (QC TDP).

    [6] Québec (Commission des droits de la personne) c. Divergence (Bar), 1994 CanLII 10722 (QC TDP).

    [7] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Guimont) c. 2632-1661 Québec inc., 1997 CanLII 43 (QC TDP).

    [8] Louise Pilon c. Corporation Intermunicipale de Transport des Forges, C.S. (1995), n° 400-05-000528-944, AZ-95021229.

    [9] Québec (Commission des droits de la personne) c. Divergence (Bar), 1994 CanLII 10722 (QC TDP).

    [10] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (D.R. et autres) c. Ducharme, 2020 QCTDP 15.

    [11] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. 9185-2152 Québec inc. (Radio Lounge Brossard), 2015 QCCA 577.

    [12] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. 9185-2152 Québec inc. (Radio Lounge Brossard), 2015 QCCA 577; Québec (Commission des droits de la personne) c. Divergence (Bar), 1994 CanLII 10722 (QC TDP).

    [13] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Le May) c. Coopérative de taxis de Montréal, 2008 QCTDP 10, par. 68.

    [14] G.P. c. École secondaire Marie-Clarac, 2008 QCCS 2896, par. 13.

    [15] Ibid.

    [16] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Larochelle) c. Montuori Holdings Corporation (Pizzeria Napoli enr.), 2008 QCTDP 2. Voir aussi, dans un contexte d’école : G.P. c. École secondaire Marie-Clarac, 2008 QCCS 2896 (une école n’a pas démontré qu’elle était dans l’impossibilité de respecter la transaction par laquelle elle s’engageait à permettre à une élève de venir à l’école avec son chien d’assistance malgré la réaction allergique aux chiens d’une autre élève. La cour souligne notamment que des changements de casiers, par exemple, n’ont pas été considérés pour essayer de prévenir la crise).

    [17] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Huard et une autre) c. Karimi, 2021 QCTDP 12.

    [18] Commission des droits de la personne du Québec (Gauvin) c. Hétu, 1992 CanLII 12 (QC TDP).

    [19] Louise Pilon c. Corporation Intermunicipale de Transport des Forges, C.S. (1995), n° 400-05-000528-944, AZ-95021229

    [20] Commission des droits de la personne du Québec (Gauvin) c. Hétu, 1992 CanLII 12 (QC TDP); Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Le May) c. Coopérative de taxis de Montréal, 2008 QCTDP 10, par. 68.

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